A quoi bon

« L’homme est capable du meilleur comme du pire mais

c’est dans le pire qu’il est le meilleur.»

 

«Quand je me regarde, je me désole.

Quand je me compare, je me console. »

Talleyrand

« N’essaie pas que ce qui arrive, arrive comme tu veux.

Veux ce qui arrive comme il arrive et tu couleras

des jours heureux. »

Epictète

« Je vois le meilleur, je l’approuve et je fais le pire. »

Ovide

« Saches que dans l’instant où une chose t’afflige,

elle est déjà en train de changer. »

A quoi bon

L’homme diffère de l’animal dans beaucoup de domaines notamment celui de l’intellect. Là où il se distingue le plus c’est d’être sujet à l’angoisse, l’anxiété, la peur panique, le stress, la crainte du lendemain, l’émotivité, l’inquiétude, la crispation, l’hypertension, le trac, la fébrilité et autres choses du même ordre. Nous avons le privilège, si l’on peut dire, de savoir que nous sommes mortels. Nous avons une tendance à dramatiser ce qui pourrait arriver, à ne voir que les défauts des autres plutôt que leurs qualités, à suivre notre mauvais penchant, à vanter nos qualités en omettant nos défauts.

Nous disposons cependant d’une arme contre ces attitudes négatives qui s’appelle le mental, la force des idées. Pour cela il faut se conditionner, se mettre dans la position de repousser les mauvaises idées. Un bon moyen est de se répéter à l’envi « à quoi bon ». Pour quelle raison se faire du souci alors que l’on sait fort bien que lorsque quelque chose nous affecte, elle est déjà, au moment même où nous sommes en train de nous lamenter, en train d’évoluer, de se modifier ? Tout change constamment et perpétuellement. La catastrophe que nous craignions en nous empêchant de dormir, peut éventuellement se transformer et aboutir à un évènement heureux. La compensation est le maître-mot de notre monde. Tout oscille autour d’un équilibre néantisé jamais atteint, avec des écarts aux amplitudes diverses dans un éternel balancement, une « bransloire pérenne » comme le dit Montaigne.

Les écarts sont la vie. Sans eux rien n’existe.

Le mental peut être d’une incroyable force si nous savons l’utiliser. Il est parfaitement reconnu que cela a un effet bénéfique sur le physique et peut même aider à guérir de graves maladies reconnues mortelles.

Notre soif de connaître n’est pas suffisante pour nous permettre de prévoir ce qui va arriver. Il faut faire place à l’imprévu et savoir trier les évènements pour lesquels on est complètement désarmé.

En disant « à quoi bon » nous convenons implicitement que nous sommes pratiquement impuissants devant les forces déployées par la nature. Nous avons effectivement un libre arbitre mais la marge de nos possibilités d’action est faible. Nous sommes ballotés par un océan de micro-évènements dont nous ne percevons que la surface apparente qui nous semble lisse et calme. Sur notre fragile esquif on ne peut donner que quelques coups de rames mais encore faut-il le faire à bon escient. La mort nous attend. On ne peut que la préparer et la retarder par une attitude positive. Devant l’adversité il faut rester « zen » c’est-à-dire avoir une certaine distanciation vis-à-vis du désespoir qui cherche à nous anéantir.

La doctrine du dualisme moderne préconise le «culte du peu». Pour mieux passer sous l’orage de la vie, il vaut mieux faire le « gros dos » en réduisant ses besoins au strict minimum comme on réduit la voile en essuyant une tempête. Ceci a pour inconvénient de diminuer les joies de l’existence mais nous procure la sérénité vers laquelle il faut, par tous les moyens, aspirer. Les oscillations de la balance sont intimement liées à l’existence. On ne peut les annuler car alors c’est la vacuité, le néant. Tout au moins faut-il les rendre plus faibles. Agir bien sûr mais le moins mal possible.

A quoi bon vouloir plus ou mieux si au fait de la réussite on ne peut que décliner ?

A quoi bon se faire « de la bile », du « mouron » comme on dit puisqu’on ignore ce qui va vraiment arriver ?

A quoi bon emprunter ce chemin semé d’embûches plutôt que celui qui nous ouvre l’espérance ?

A quoi bon se faire « du tracas » puisque « dans la vie faut pas s’en faire ?»

A quoi bon croire au paradis car ce lieu doit être d’un mortel ennui ? Que sait-on de la mélodie du bonheur s’il n’y a pas de malheur pour l’apprécier ?

A quoi bon se morfondre puisqu’on nait rien. La vie est une séquence insignifiante à l’échelle de l’univers. Elle part de rien pour aboutir à rien. Parcourons ce chemin au mieux des maigres possibilités que nous a confié la nature.

Le culte du peu n’est qu’un pis-aller, un moindre mal dont il faut se satisfaire mais générateur de meilleur être.

La vie est une question dont on ignore la réponse et si elle nous était connue elle nécessiterait une autre question et ceci indéfiniment. Mais sans ces questions angoissantes il n’y aurait pas de vie possible. L’incertitude est notre lot et l’essence même de notre monde. Nous avons la certitude que rien n’est sûr. Nous sommes issus du probable. Il est préférable de s’en accommoder plutôt que de vouloir le vaincre par d’inutiles efforts.

Ainsi parlait Lao-Tseu.

 

 

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