La tactique du Tic Tac
« Et si le temps n’existait pas »
Carlo Rovelli
« Le temps est l’image mobile de l’éternité immobile »
Timée Platon
Une horloge peut-elle « à la fois » avancer et retarder ? Que cela soit possible dépasse complètement notre entendement. C’est de même ordre que d’envisager qu’une porte puisse être « à la fois » ouverte et fermée.
C’est pourtant ce que montre l’expérience suivante : deux miroirs concaves supra-conducteurs sont disposés en face l’un de l’autre et reflètent un ou plusieurs photons. Ces photons peuvent être réfléchis un milliard de fois avant d’être absorbés. Ceci permet de les isoler du monde extérieur pendant un dixième de seconde. On a ainsi un champ de micro-ondes entre les deux miroirs. Des atomes de Rydberg sont mis dans un état très excité par un laser en B, à la limite de la ionisation. Leur électron est au 51ème niveau d’énergie. On applique en R1 sur ces atomes hyper-excités une impulsion micro-onde dont la fréquence correspond à la transition entre l’état 51 et l’état 52 de l’atome qui est alors dans un état de superposition. Il est « à la fois » dans l’état 51 et l’état 52. Ces atomes traversent les miroirs et la région R2 permet d’analyser cette superposition après interaction avec le champ électro-magnétique des photons. Le détecteur mesure l’état de l’atome et ainsi donne une information sur l’état du champ entre les miroirs. Les photons en traversant l’atome sont déphasés. Comme ce dernier est en état de superposition leur champ est déphasé en même temps, en plus et en moins.
Les oscillations du champ fonctionnent normalement comme une horloge qui après le passage de l’atome retarde et avance à la fois. Si l’on veut lire l’heure c’est-à-dire intervenir de l’extérieur alors cet état étrange s’efface. Ce phénomène est appelé décohérence. Un deuxième atome surexcité envoyé entre les miroirs rétablit partiellement le fonctionnement de l’horloge. L’interférence entre ces deux états d’interaction fourni par sa variation le temps de décohérence. Ce temps est également fonction du nombre de photons. On peut ainsi retarder la décohérence et s’approcher au plus près possible de l’état macroscopique où l’horloge bat à un rythme régulier.
Chacun sait que le numérique, qui a complètement bouleversé notre civilisation, est basé sur une chaine de 0 et 1 (le courant passe ou ne passe pas dans un transistor). Cette chaine par son énorme diversité de combinaisons est porteuse d’informations que l’on peut traduire dans notre langage habituel. Etant donné la miniaturisation par circuits intégrés extrêmement rapides, on peut communiquer n’importe quel message à grande vitesse.
Mais qu’en est-il si la chaine ne comporte que des 0 ou des 1 ? Cela ne signifie évidement rien. C’est l’éternité immobile de Platon. Alternons maintenant les 0 et les 1 : 0101010101…. Le message est alors : répéter indéfiniment 01. Cela pourrait être le battement régulier du temps scientifique. Mais on ne peut écouler du temps sans définir le temps de passage de 0 à 1 et de 1 à 0. Il faudrait donc établir ce qu’est le temps en utilisant ce temps. Donner en quelque sorte du temps au temps suivant la célèbre expression. C’est le raisonnement circulaire qui n’a pas d’issue. Il faut pour s’en sortir définir le temps par un évènement concret, expérimental auquel on va se référer. C’est une convention comme celle d’autres unités de mesure. Pour mesurer le temps le battement de référence est la durée de 9.132.631.770 périodes de la radiation entre les niveaux hyperfins de l’état fondamental de l’atome de cesium 133 au repos, à 0° degré Kelvin.
Dans un atome, un électron passe, par un saut quantique d’un niveau d’énergie au plus proche. C’est la durée de ce passage qui définit le temps scientifique. On mesure ainsi le temps par une durée. Ceci exprime parfaitement que le temps en lui-même est le passage brusque d’un état à un autre d’un atome particulier. Le temps qui s’écoule uniformément en continu est un leurre. On ne peut mesurer qu’en comptant un certain nombre de saut « supposés » toujours identiques. Jusqu’où peut-on aller avec la réduction de ces sauts ? Il y a une limite où les sauts ne sont plus distinguables. L’inéluctable erreur sur la mesure de cet imperceptible saut peut fournir cette limite que serait de 10-44 secondes. L’indétermination empêche d’aller au-delà.
C’est finalement un nombre qui définit le temps. Pour une seconde ce nombre est la fréquence du rayonnement électro-magnétique qui fait changer l’atome de niveau d’énergie.
Le temps est donc une succession de saut supposés réguliers que l’on peut symboliser par une suite de 010101…. C’est une symétrie que l’on peut briser en introduisant des 0 et des 1 dans la chaine comme par exemple 0010110001…..
S’il y a n 0 et 1, l’on sait que cela peut générer 2n combinaisons ce qui peut devenir rapidement énorme (voir notre article « Le grand échiquier » sur le site dualisme.com). On peut alors coder un message, une information, en général des données, par une convention appropriée.
Toutes la connaissance humaine peut s’exprimer dans une suite de 0 et de 1. Notre cerveau ne peut percevoir et enregistrer que des différences. La plus petite différence est le saut quantique qui a déjà servi à exprimer le temps. On peut aussi tout exprimer avec ces sauts en passant de 0 à 1 ou de 1 à 0. Dans ce cas il y a un choix entre 0 ou 1 pour succéder à 0 ou 1. Il y a ainsi, comme au jeu de pile ou face, une probabilité de 50% d’avoir 1 ou 0. On sait que la plus petite unité d’information est le bit qui correspond au logarithme de base 2 de la probabilité de ½.
Le bit est donc log2 ½=log21-log22=0-1=-1
Le nombre de 1 correspond à la quantité de bits et mesure l’information véhiculée par la chaine de 0 et de 1
On peut comparer la chaine 0,1 à une onde. Dans le cas du temps cette onde est régulière avec une amplitude qui caractérise l’énergie déployée qui est son carré et une période qui est son temps de reproduction à l’identique. En superposant des ondes régulières avec des amplitudes diverses et des périodes réduites de moitié on obtient des harmoniques. Leur enchâssement l’une dans l’autre peut donner toutes sortes de combinaisons analogues à celles des chaines 0,1 et peut aller au plus proche de l’infini. Une onde seule est précise sur l’énergie qu’elle produit mais beaucoup moins sur sa position. Or plus on accumule les ondes harmoniques plus la position se précise au détriment de l’énergie. L’importance de l’amplitude détermine la probabilité de mieux entendre l’harmonique concernée.
Les ondes par leur infinie combinaison fournissent des éventualités de présence au même titre que les particules discrètes. C’est une analogie qui justifie le concept d’onde-particules. La discrétion est justement le fait de ne tenir compte que de 0 ou de 1 avec une probabilité de passer de l’un à l’autre.
Tout cela est à l’origine de l’étrange comportement de ces objets quantiques que sont pile et face comme une pièce de monnaie mais peuvent se réaliser en soit pile, soit face. Une accumulation d’harmoniques peut aussi bien communiquer de l’information comme les chaines de 0 et de 1.
Une particule et une onde manifestent une quantité d’ingrédient nommé énergie qui est la possibilité de bouger, vibrer et se mouvoir.
Dans notre article « Dieu-énergie » nous précisons que l’énergie est comme le temps, indéfinissable.
Voyons si ces deux notions ont entre elles des relations.
Pour l’onde, l’amplitude caractérise la force avec laquelle l’onde s’éloigne du milieu qu’est le temps par la période et l’espace par la longueur d’onde.
Pour une onde régulière la courbe décrite est une sinusoïde. L’amplitude varie donc comme le sinus. L’énergie est proportionnelle à la surface entre l’onde et son milieu. Elle en est l’intégrale. Si l’amplitude est « a », l’énergie est « a² ».
Il y a aussi analogie entre l’onde et la particule. Cette dernière se caractérise en fait par une amplitude de probabilité de présence dont le carré est sa probabilité d’existence.
Onde et particule sont bien les deux faces d’un même objet.
Par l’expérience de Planck, on a constaté en la mesurant le plus précisément possible que l’énergie développé par un rayonnement électro-magnétique est dans un rapport constant avec sa fréquence. Cette relation est la constante de Planck « h ». Cela signifie que s’il y a une seule vibration en une seconde dans ce cas « h » est une action c’est-à-dire le produit d’une énergie par le temps. Si l’énergie développée par une onde de fréquence f est E on a E=hf. Ceci signifie que l’énergie développée par chacune des vibrations a pour valeur h.
On peut assimiler le 1 de la chaine numérique à l’énergie manifeste par une vibration soit h.
En résumé, tout évènement quel qu’il soit, peut s’exprimer par un enchainement de rien et de valeur énergétique h. Qu’il y a-t-il entre les deux ? Simplement une probabilité d’accéder à h et de conférer ainsi l’existence.
Il est évident qu’une probabilité est virtuelle et n’exprime qu’une éventualité d’être.
La quantité fh est l’énergie suivant l’espace et le temps et caractérise numériquement l’existence. Qu’en est-il de 0 ? Ecrire ou parler de 0, de rien, du néant n’est déjà plus ce qu’il symbolise. Pour lui donner un état il faudrait pouvoir le mesurer donc avoir un étalon qui aurait pour valeur 0.
Cela n’est pas envisageable. 0 c’est la non-existence, l’impossible, l’improbable. On ne pourrait y accéder que par l’infinie régression. Cela consiste comme pour les harmoniques à réduire la période constamment de moitié. On sait qu’on ne peut atteindre un but si l’on fait toujours la moitié du chemin qui nous sépare de lui.
Entre fh qui est le fait d’exister, il n’y a que des probabilités qui régressent en se réduisant vers 0 sans jamais l’atteindre.
Le probable est ce qui distingue sa virtualité. C’est le propre de la physique quantique.
En physique classique un évènement n’est probable que par l’ignorance que l’on a de tout ce qui peut concourir à sa réalisation. La superposition quantique n’est qu’un univers de possibles.
Une onde-particule peut « à la fois » être et ne pas être. Notre capacité cérébrale est absolument incapable d’envisager cette situation. Nous ne percevons que la destruction, la séparation. La non-séparabilité, l’indiscernabilité des éventualités est le domaine du quantique. On pourrait y accéder par l’observation, la mesure mais dans ce cas le monde quantique s’effondre en passant du probable au réel. Accès interdit sinon éparpillement, dispersion. La quantité évolue entre l’impossible (0) et le certain (1). C’est le champ étendu à tout ce qui a des chances d’exister.
Notre repère c’est la lumière. Si un homme a perdu sa clé dans une rue sombre, il la cherche sous le réverbère parce que c’est le seul endroit éclairé.
En relativité tous les référentiels inertiels à vitesse v donc avec une force de vive mv² se rapporte à celui de la lumière dont la vitesse est c. Ce rapport s’exprime relativement par l’expression soit 1- .
Tout s’exprime par le carré, ce qui élimine le négatif.
On a vu que tout pouvait s’énoncer sous forme de sauts quantiques de l’électron provoqués par le photon d’énergie hf.
On a également vu que le 1 de l’informatique peut être assimilé à h. On peut par conséquent envisager que la chaine informatique soit un ensemble de rien et de h, la relation entre eux s’effectuant par le probable.
Le temps scientifique est une succession régulière de rien et de h. Il y a une relation de causalité entre ces deux éléments. La causalité peut se traduire par des dominos qui se font chuter les uns après les autres. Il faut un certain temps pour qu’un domino qui tombe provoque la chute de celui qui est devant. Il y a ainsi une vitesse de parcours dont on peut imaginer qu’elle soit telle que 300.000 km soient parcourus en une seconde (ceci est la vitesse de la lumière) à la condition que les dominos aient une valeur chacun de h. On sait que h est lié au changement de niveau d’énergie de l’électron. On peut très bien imaginer que chaque saut d’électron en entraine un autre jouant ainsi le rôle des dominos.
On ne connait pas le temps de chute d’un électron à son niveau inferieur. Même si le temps est extrêmement faible il ne peut être nul. Voilà une explication qui peut sembler fantaisiste et sans le support de l’expérience mais elle permet de relier entre eux h&c. On peut très bien envisager qu’un électron qui chute d’un niveau et remonte à son niveau précédent par l’impulsion d’un photon, peut être celui qui serait le résultat de la chute. On peut ainsi imaginer une partie de ping-pong où la balle est renvoyée constamment de chaque côté de la table.
Nous avons montré une similitude entre le temps, l’information et l’énergie. Il pourrait être envisagé une symétrie parfaite comme une suite de 0,00000….. ou de 1,11111….. Que s’est-il passé pour que l’existence soit perçue. Il y a eu une brisure de symétrie en passant de 0 à 1 ou de 1 à 0 qui a pour valeur h. On ne peut réduire l’énergie à moins que h. L’énergie est comme la monnaie d’échange qui ne s’évalue qu’à un maximum de centime d’euro. On arrondit à cette valeur.
Cette brisure de symétrie à l’origine de la notion de constance peut revêtir la forme d’une vibration la plus petite possible. Son énergie aurait pour valeur h ou plutôt la moitié de la valeur de h/4π que l’on symbolise par ℏ/2. Ceci est le niveau fondamental de l’électron. En dessous de cette valeur il n’y a que des probabilités et pas de 0 comme on l’a déjà dit. La période la plus faible serait de 5.4×10-44 seconde. Ceci correspond à une longueur d’onde, à la vitesse c, de 1.6×10-34 mètre. Apparemment on ne peut faire plus petit à cause de l’incertitude sur les mesures. Tout est multiple de cette vibration de base. Une vibration ne peut s’interrompre et s’annuler. Elle est indivisible. La surface, le volume, l’espace ne sont que du temps muni du coefficient c pour la distance.
L’indétermination du quantique est la conséquence de cette cellule primordiale inévaluable. On ne peut aller au-delà de cette goutte d’énergie, d’espace-temps. Si on le prend comme unité de base on peut affirmer que tout ce qui existe est multiple entier de cette petite perle qui, comme le filet d’Indra, est le reflet de toutes les autres ainsi que chacune d’entre elles. Comme disait le Guru Nanak « La goutte d’eau est dans l’océan et l’océan est dans la goutte d’eau ».
L’énergie et l’espace-temps sont indéfinis et indéterminés car ils ne peuvent se référer à aucun absolu qui se dérobe au fur et à mesure qu’on pense l’atteindre.
Tout interagit et chaque objet est la conséquence de beaucoup d’autres.
Il n’y a pas de repos absolu mais tout voudrait s’y réfugier tout en étant écartés.
Le temps, l’espace, l’énergie, l’information ne sont que des vibrations que l’on peut compter numériquement car elles sont indivisibles.
Pythagore qui s’était aperçu qu’en réduisant de moitié la longueur d’une corde d’instrument de musique, on doublait ses vibrations, sa fréquence. La corde résonnait à une octave au dessus.
Pythagore aurait dit : « Tout est nombre »
en pensant sans doute aux vibrations.
Le saut de l’électron animé par le photon est à la base de tout ce qui s’agite. Il est indivisible et peut ainsi constituer une suite de 0 et de 1.